Comment l’émergence de molécules complexes, loin de constituer un hasard,
découle simplement dans notre univers des lois de la physique...
Quel émerveillement peut saisir le néophyte lorsqu’il découvre, par exemple, un modèle moléculaire décrivant la structure d’une molécule comme l’ADN. Comment croire qu’une telle molécule a pu simplement émerger du chaos primordial? Comment ne pas y voir, au-delà de la croyance, la marque d’une destinée, d’une volonté transcendante? Ces impressions ne font que réactualiser les arguments de l’archidiacre W. Paley (1) qui, en 1802, entreprit dans son ouvrage, “la théologie naturelle”, de démontrer l’existence de Dieu en se basant sur le degré de complexité atteint par les êtres vivants, dans laquelle il ne pouvait voir que la marque d’un dessein.
Et pourtant... là encore, recherche et raison permettent de dépasser les trompeuses évidences procédant d’un examen superficiel des faits, et de démêler l’écheveau qui nous conduit, au travers de milliards d’années d’évolution, des premiers atomes d’hydrogène aux premières molécules douées de l’étonnant pouvoir de se reproduire.
Mais quel est l’étonnant secret de ces molécules? Il est simple, en fait: du temps, beaucoup de temps, et de l’énergie. Nous allons parcourir le chemin qui, au fil d’une dizaine de milliards d’années, conduit de l’atome le plus simple à une molécule susceptible de se reproduire, base du phénomène vivant.
Au commencement était l’hydrogène
Lors de l’émergence de notre univers, deux particules, à la base de ce que nous appelons la matière, se sont formées: le proton et l’électron. Signalons en passant que toute la matière que nous connaissons ne semble former, au vu des dernières données sur l’univers primordial fournies en février dernier par le satellite WMAP (2), qu’un faible pourcentage de notre univers: celui-ci serait constitué de 4 % de matière “ordinaire” seulement (23% de “matière” inconnue s’y rajoute...) et de 73 % de ce que les théoriciens, pour masquer leur ignorance quasi absolue, appellent “énergie noire”... Ce qui nous en dit longs sur les jérémiades des philosophes autoproclamés qui annoncent périodiquement que la science est arrivée à son terme!
Reprenons donc l’histoire de nos 3% à son début: dans un petit univers, protons et électrons vaquent à leurs occupations à des vitesses telles qu’ils ne prêtent qu’un intérêt discret l’un à l’autre. Cette situation ne va pas durer: l’univers s’étend, se distend et se refroidit (plus exactement, sa densité énergétique décroît). Protons et électrons vont commencer à se rapprocher, voire à se percuter, leur addition formant un nouveau larron, qui lui ne portera pas de charge électrique: le neutron. Certaines rencontres, moins violentes, vont se terminer, lorsque l’univers sera assez froid, par une association qui va changer le monde: l’électron va se mettre à tourner autour du proton, constituant le premier des atomes: l’hydrogène était né. Il n’était cependant pas seul: un autre atome, l’hélium, comportant 2 protons et 2 électrons, constituait aussi 25% de la population atomique de ces âges lointains. S’ajoutaient quelques traces de lithium et béryllium, formés par collision d’atomes pendant la brève époque ou l’énergie de ces derniers était suffisante pour permettre quelques fusions des noyaux d’atomes. Nos atomes minimalistes (1 proton + 1 électron) se sont unis 2 à deux pour former la première des molécules, celle du dihydrogène H2. Pas de quoi, cependant, construire le moindre être vivant à cette époque, il y a... 10 milliards d’années.
A Star is born
Les molécules esseulées ont commencé à se rassembler sous l’influence de la gravité, formant des condensations de plus en plus étendues. Précisons que le mécanisme de cette condensation primordiale est très imparfaitement connu. On ne sait si il a conduit à des galaxies s’effondrant en étoiles ou à des étoiles se rassemblant en galaxies... Malgré tout, les premières étoiles se sont formées.
Lorsqu’une grande masse d’hydrogène se condense, son diamètre diminue, sa densité augmente jusqu’au point où les molécules se dissocient en atomes. Dans le coeur de l’étoile, ils sont si serrés et si agités que, malgré la répulsion qu’ils s’inspirent, leurs noyaux se “collent”: ils fusionnent, se transforment en hélium en libérant une énorme quantité d’énergie.
Ce phénomène de fusion nucléaire va être à la base de la formation de tous les autres atomes de l’univers: protons et neutrons vont s’additionner, se rapprocher et s’organiser en couches complexes alors qu’autour d’eux les électrons, contrebalançant leurs charges électriques, constituent un nuage complexe.
Une étoile naît alors. Sa production d’énergie tend à la faire exploser alors que sa masse provoque au contraire sa contraction. L’étoile se maintient de façon à équilibrer ces deux forces: toute étoile est donc sur la corde raide, et navigue toute sa vie entre le Charybde de l’explosion et le Scylla de l’effondrement gravitationnel. Quand une étoile manque d’énergie, elle se contracte, et si elle en a trop, elle gonfle.
A la fin de leur vie, les petites étoiles comme notre Soleil s’éteignent doucement, ne trouvant plus dans leur coeur d’hydrogène à fusionner. Elles n’auront fabriqué que de l’hélium et, vers la fin de leur vie, un peu de carbone (6 protons associés étroitement à 6 neutrons, et 6 électrons tournicotant autour). Mais les premières étoiles qui se sont formées alors que la galaxie était encore en contraction possédaient une masse bien plus importante, s’étant condensées dans un milieu où la matière première était surabondante. Ces grosses étoiles (plus de 8 masses solaires), elles, contiennent suffisamment de matière pourqu’en se contractant elles puissent réaliser de nouveaux collages, de nouvelles fusions entre atomes: après avoir, pendant des millions d’années, fusionné de l’hydrogène en hélium, elles se mettent à “coller” les noyaux des atomes d’hélium ensemble pour former du carbone, puis du néon, puis de l’oxygène, du magnésium, du silicium...
Cependant, plus les atomes à assembler sont lourds et plus il faut d’énergie à l’étoile pour les fusionner: elle se contracte donc, de plus en plus, mais ces fusions successives durent de moins en moins longtemps: Le mécanisme finit par s’emballer, l’étoile fusionne des éléments les uns après les autres en prend une structure en “pelure d’oignon”, où à chaque étage correspond une fusion, la fabrication d’un atome précis. Jusqu'où cela va-t’il ? Jusqu’au moment où dans le coeur de l’étoile va s’accumuler du fer. C’est le cul de sac de la fusion: le fer étant l’atome le plus stable, il faut une énergie énorme pour le fusionner. Cette énergie, l’étoile ne l’a pas. Alors, brutalement, la fusion s’arrête dans son coeur de fer mais se poursuit dans les différentes couches de l’étoile. Les atomes de fer formés s’accumulent en son centre. Lorsque la masse de fer devient trop grande, les atomes sont trop serrés et, soumis à une pression énorme, ils s’effondrent pour former un noyau atomique géant, quasiment incompressible: les couches externes de l’étoile se précipitent à grande vitesse sur ce coeur... sur lequel elles rebondissent avec une force incroyable, générant des ondes de choc et des ondes sonores d’une énergie fantastique: en quelques microsondes, l’étoile explose et forme ce que l’on appelle une supernova. L’énergie dégagée est telle qu’une fraction du fer fusionne à son tour en un éclair pour donner une suite d’éléments plus lourds, comme le plomb, le titane, l’or et l’uranium par exemple (ce qui explique la rareté de ces éléments!). Cette explosion disperse dans l’espace les atomes constituant l’étoile: de l’hydrogène inutilisé, de l’hélium et toute une suite d’atomes plus lourds comme le carbone ou l’oxygène. La supernova est aussi une source d’ondes de choc qui pourront amorcer la contraction d’autres nuages gazeux. A leur tour, ceux-ci, enrichis en éléments lourds, formeront une deuxième génération d’étoiles, de tailles variées.
L’enrichissement du milieu interstellaire n’est pas uniquement le fait des étoiles explosives: parmi les moins massives, les réactions de fusion peuvent s’arrêter avant d’atteindre le stade du fer, surtout au niveau de la synthèse de carbone, qui demande environ un demi-million d’années. Lorsque l’étoile ne fonctionnera plus, ses rayonnements disperseront dans l’espace son enveloppe d’hydrogène enrichie d’hélium et de carbone.
Destin de deux étoiles: celle de type solaire vit longtemps, mais enrichit peu le milieu interstellaire en atomes nouveaux (bien qu’elle synthétise certaines molécules organiques). La supergéante, au contraire, a une vie brève, mais fabrique les éléments indispensables à la vie.
On lit souvent dans les ouvrages d’astronomie que seules les supernovae enrichissent le milieu interstellaire en éléments lourds. Ce n’est donc pas tout à fait exact: les étoiles qui sont juste un peu plus massives que le soleil utilisent le carbone, l’oxygène et l’azote pour entretenir les fusions qui leur donnent de l’énergie. De même, la fusion nucléaire n’est pas le seul mécanisme permettant de fabriquer de nouveaux atomes: l’azote se forme à partir d’atomes d’oxygène qui reçoivent des rayonnements α en provenance du coeur de l’étoile, par exemple. Ce processus, appelé spallation, permet de fabriquer plusieurs atomes différents, dont certains se décomposeront, car ils sont instables: on les dit radio-actifs. De même, l’explosion d’une étoile n’est pas la seule façon de communiquer des éléments lourds à l’environnement galactique: la majorité des étoiles émettent de la matière sous la forme d’un “vent stellaire” qui, vers la fin de leur vie, est enrichi en éléments comme le carbone. Ainsi, au fil des générations successives d’étoiles de taille variée, les nuages de gaz s’enrichissent progressivement en atomes “lourds” (pour les astronomes, c’est à dire différents de H et He!), s’effondrent, se condensent, forment une autre génération d’étoile qui à son tour enrichit le milieu: pendant 7 à 8 milliards d’années, chaque génération stellaire augmente l’accumulation de carbone, d’oxygène et d’azote dans les nuages de gaz du disque galactique. Lorsque cette quantité devient suffisante, de nombreuses molécules différentes seront disponibles dans l’espace, et des planètes solides vont pouvoir se former avec les étoiles et s’entourer d’une atmosphère.
Une centaine d’atomes... crochus
Nous nous retrouvons ainsi avec une centaine d’atomes différents, devenant de plus en plus rares au fur et à mesure que leur masse augmente (les plus massifs deviennent même instables, et se désintègrent en émettant des morceaux, les particules: ce sont des atomes radio-actifs). C’est bien plus qu’il n’en faut: pour l’essentiel, les molécules spécifiques des êtres vivants (comme , pour notre exemple, l’ADN et l’ARN) sont bâties à partir de 5 atomes différents seulement! Ces atomes sont à la fois les plus abondants et les plus réactifs, ce qui implique que leur utilisation est probable pour tous les êtres vivants de la galaxie... bâtis donc sur une base semblable!
Nous retrouvons donc (par ordre d’apparition) nos héros de la chimie biologique, ces atomes sans qui nous ne serions pas stars:
L’Hydrogène, notre père qui fut aux cieux
Le carbone, indispensable épine dorsale de nos molécules constitutives
l’Azote, si présent dans les bases de l’ADN et l’ARN
L’Oxygène, si réactif
Le Phosphore, notre source d’énergie encore à ce jour
Si vous disposez de cette merveille qui s’appelle un tableau de la classification périodique des éléments (qui, bien compris, permet d’expliquer à peu près l’intégralité de la chimie...), vous remarquerez que tous ces atomes sont blottis dans une même zone... Ce qui signifie qu’ils partagent quelques caractères communs, et en premier lieu celui de contenir assez peu de nucléons dans leurs noyaux... Si l’on excepte l’H, tous ces éléments sont des métalloïdes. Entre autres caractéristiques communes, ces derniers, lorsqu’ils sont oxydés, vont s’hydrater en formant des acides...
Les liaisons dangereuses
Mais qu'est-ce qui pousse les atomes à se lier entre eux? Essentiellement le comportement volage et peu recommandable de leurs électrons les plus lointains, qui ne rêvent que de former des couples à la fidélité sujette à caution, les doublets, l’échangisme étant plutôt la règle que l’exception dans le petit monde des atomes. Qu’on en juge: les électrons s'organisent en en nuage extrêmement bien structuré (3) , composé d’orbites hiérarchisées. Seuls les électrons les plus externes vont participer aux réactions chimiques, avec une idée fixe: compléter leur orbite avec un ou plusieurs compagnons ou bien quitter une orbite inhospitalière et mal fréquentée pour celle d’un autre atome plus accueillant... (ce qui explique pourquoi les atomes qui ont leur dernière orbite “pleine” ne sont que très peu réactifs: He, Ne, Ar; Kr et Xe, les gaz rares, ne peuvent se lier à d’autres atomes...)
Si vous avez bien suivi, vous avez deviné que l’Hydrogène, avec son électron célibataire, ne peut se lier qu’a un seul autre atome: on dit qu’il ne peut former qu’une seule liaison chimique. Le carbone dispose, et c’est exceptionnel, de 4 électrons externes et peut donc établir 4 liaisons; l’azote 3 et l’oxygène 2. Pour établir une liaison, il faut que les atomes soient suffisamment proches et que les électrons puissent sauter d’un atome à l’autre pour établir des orbites englobant les deux noyaux. Pour cela, on dit que les électrons doivent être excités (décidément...). Une énergie bien particulière sera nécessaire et absorbée par les atomes, et permettra d’établir les liaisons. Notons aussi que les différentes liaisons sont séparées par des valeurs angulaires caractéristiques, permettant par exemple pour le carbone la réalisation de “cycles” fermés comportant 6 atomes de C... ou même d’autres cycles contenant d’autres atomes! Le sucre est, ainsi, une molécule formée de deux cycles combinant Carbone et Oxygène...
Premières molécules
Avant même que notre planète ait fini de croître et d’embellir à partir des matériaux orbitant autour du futur soleil, des molécules étaient présentes dans le nuage présolaire, et étaient déjà plus complexes que l'on pourrait le croire. De nos jours, les astronomes observent la signature radio de ces molécules dans les systèmes planétaires en formation (4).
Ainsi, au gré des chocs, le carbone se combine avec les autres atomes disponibles (surtout de l'hydrogène).
Parmi les molécules présentes, on trouve du méthane (CH4), de l’eau et de l’ammoniac (NH3). Ces éléments réagissent entre eux, en fonction de la température, selon les équations:
2 NH3 <------> N2 + 3H2
CH4 + H2O <------> CO + 3H2
Ces réactions se produisent vers la droite à faible température (loin du soleil) et dans l’autre sens dans les régions plus chaudes.
L’observation des grands nuages moléculaires qui parsèment le disque de notre galaxie (et des autres!) a permis aux astronomes d’aller de surprise en surprises en découvrant un milieu fort complexe et déjà très évolué. Il y a une trentaine d’années, beaucoup pensaient que les nuages interstellaires ne contenaient qu’une dizaine au plus de molécules très simples, limitées à 2 ou 3 atomes. Des études plus poussées ont bouleversé ces conceptions: on a dénombré actuellement plus de 120 molécules différentes, dont surtout de l'eau, du méthane, de l'ammoniac, du monoxyde de carbone, des radicaux libres (molécules ne pouvant exister que dans le vide, ou pendant un temps très bref, comme OH-, H3+) intervenants dans les synthèses des autres molécules, mais également des molécules beaucoup plus complexes, dont seul l’astrophysicien anticonformiste Fred Hoyle avait pressenti l’existence à la fin des années 70. Ainsi, des hydrocarbures (HC3N, CH3CN, CH3CHO...), des alcools (méthanol, éthanol) et des dérivés du cyanure (CN) se forment facilement: les glaces qui recouvrent les silicates, composés d'eau, de méthanol et d'hydrocarbures, jouent le rôle de piège moléculaire qui empêche la dispersion des molécules qui peuvent se recombiner sous l'action du rayonnement U.V. stellaire (5). Un nuage de gaz situé près du centre galactique a même révélé contenir du glycolaldéhyde (C2H4O2), aussi retrouvé dans des météorites, qui peut en se combinant conduire à du glucose ou du ribose. Cette dernière molécule est une de nos pièces détachées conduisant à l’ARN, puis l’ADN...
Comme les atomes de carbone s’associent facilement pour former des cycles hexagonaux, ils peuvent aussi former des molécules de forme complexe, que l’on regroupe sous le terme de fullerènes: ce sont des assemblages de cycles hexagonaux de carbone qui se replient dans l’espace pour former des sphères), des tubes ou des volumes de forme plus irrégulière. Ces molécules présentent des caractéristiques physiques remarquables qui leur donnent un grand intérêt dans l’élaboration des structures vivantes: elles peuvent constituer des “prisons” retenant des monomères ou des molécules plus simples ou s’associer entre elles pour former des flocons agissant comme des catalyseurs et accélérant les réactions chimiques mettant en jeu d’autres molécules.
Les molécules du vivant, de l’eau et du vent (stellaire!)
Les plus importantes des molécules caractéristiques des êtres vivants sont de très grandes tailles: on parle de macromolécules, ou polymères. Elles sont formées de l'enchaînement de molécules plus petites, les monomères. En simplifiant beaucoup, on peut distinguer 3 grands groupes de macromolécules caractérisant le vivant:
•Les polysaccharides sont formés de l’enchaînement de plusieurs centaines à plusieurs milliers de sucres
•Les protéines sont des enchaînements d'acides aminés, et constituent l’essentiel des structures non informatives des cellules. Bien qu’il existe plusieurs dizaines d’acides aminés différents, les êtres vivants n’en utilisent que 20. Leur fabrication nécessite actuellement l’exploitation d’une information contenue dans d’autres macromolécules, les acides nucléiques.
•Les acides nucléiques comme l'ADN et l'ARN contiennent et transmettent les informations qui permettent la reproduction et le fonctionnement des cellules. Ils sont formés de l'enchaînement de nucléotides. Il en existe 5, utilisés par tous les êtres vivants. L'ARN est capable de se répliquer lui-même et fut sans doute le premier acide nucléique. Il est “l’ancêtre” de l’ADN. Pour le fabriquer, il faut disposer d'un sucre, le ribose, de phosphate et de 4 bases différentes. La morphologie de ces molécules est extrêmement importante et explique leurs propriétés. L’ADN est une molécule “double”, constituée d’une hélice liée à son image, sa copie: c’est donc une hélice double, ce qui lui permet de se multiplier. Cette double hélice est entortillée plusieurs fois sur elle-même, comme un cordon de téléphone ou une corde à noeuds, et se lie à des protéines.
L’ARN est lui constitué d’une seule file d’acides nucléiques qui se replient sur eux-mêmes, tout comme les acides aminés d’une protéine. Les ARN possèdent donc une forme spécifique, et sont de longueur très variable: il existe dans les cellules actuelles plusieurs types d’ARN possédant une fonction précise.
Construisons de l’ARN
Les modalités exactes ayant précédé à l’apparition de cette molécule sont loin d’être connues. Il est probable que de nombreux précurseurs ont disparu, organisés de façon différente, et ont progressivement conduit à cette molécule.
Une question se pose alors: une molécule, ce n’est pas la vie. Ne sommes-nous pas trop réducteurs? Je rappelle que le but de notre voyage était simplement de montrer comment on pouvait passer d’atomes épars à une molécule complexe, et ceci, de façon simple, sans autres moyens que la physique et la chimie.
On pourrait aussi considérer que les formes de “vies” les plus simples, les plus élémentaires que nous connaissons sont justement constituées par une simple molécule d’ARN repliée sur elle -même: ce sont les viroïdes, d’étranges parasites des plantes, quasiment inconnus, constitués d’un simple brin d’ARN entortillé sur lui-même, et se reproduisant lorsqu’il arrive à pénétrer dans une cellule de pomme de terre, par exemple...
Ribose et phosphate sont aisés à obtenir:
Le phosphate se forme simplement lorsque l’atome de phosphore rencontre l’oxygène. Le plus souvent, le fournisseur d’Oxygène est l’eau, tout simplement. Il se forme alors de l’acide hortophosphorique H3PO4... lequel est fortement réactif, c’est à dire a tendance à former facilement des liaisons chimiques grâce à ses atomes d’oxygène qui, avec les H adéquats, font de lui un “triacide”:
P2O5 +3H2O --> 2 PO4H3
Le ribose est un cycle de formule C5H10O5. Comme les autres glucides, il a pu se former par condensations formolique, à partir d’une petite molécule, le formaldéhyde.
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condensation formolique aboutissant au ribose
De l’eau, mais point trop n’en faut
La synthèse de la moitié des bases, celles formées de deux cycles C+N (que l’on appelle les bases puriques: adénine et guanine) peut se faire à partir de l'acide cyanhydrique (avec un intermédiaire, le diaminomaléodinitrile).
La synthèse des autres bases comportant un seul cycle (pyrimidiques: l'uracile, la thymine et la cytosine) est plus problématique. Il est possible qu’elles résultent de la dégradation de molécules plus grandes, mais plus faciles à synthétiser.
Un des problèmes à résoudre pour la réalisation de ces synthèses vient de la présence d’eau: bien que cette molécule soit indispensable aux réactions, présente en trop grande quantité, elle va diluer les réactifs et interdire les réactions: il a donc fallu, très tôt dans l’histoire de la vie, qu’existent des volumes limités, des “bioréacteurs” de taille cellulaire, dans lesquels les réactions se sont accomplies. Ces structures ont pu être, tout d’abord, de nature minérale. L'adsorption sur des minéraux argileux (6) permet d'offrir une grande surface réactionnelle aux molécules qui sont d'ailleurs orientées par les forces électrostatiques s'exerçant au niveau moléculaire entre les différents feuillets de ces minéraux, le tout en limitant la quantité d'eau présente.
Le mélange réactionnel peut être concentré par évaporation ou congélation. Enlever l'eau favorise également les mécanismes de polymérisation, qu’il s’agisse d’acides aminés ou nucléiques.
Des réactions de chimie sèche sont également possibles: S. Fox a montré que des AA secs polymérisent à 130°C. On obtient alors des "thermoprotéinoïdes ", des molécules qui seraient les ancêtres des protéines. Avec des polyphosphates, la polymérisation à sec se produit à 60°C (on peut ainsi aboutir à des polymères de 200 AA environ). Ces premiers polypeptides ont pu servir de “chaperons” moléculaires assurant la protection des premiers acides nucléiques, plus fragiles (c’est toujours ainsi qu’est protégé, par exemple, l’ARN de certains virus).
Assemblons les Acides nucléiques
La condensation de l'adénine et du ribose donne de l'adénosine, un nucléotide qui en se liant à 3 groupes phosphate donne de l'Adénosine Tri Phosphate (ATP), toujours utilisé pour transférer l'énergie dans les cellules des êtres vivants.
Pourquoi utiliser l'ATP et non pas la Guanine Tri Phosphate (GTP), la Cytosine Tri Phosphate (CTP) ou l'Uracyle Tri Phosphate (UTP)? La synthèse de l'adénine se révélant plus facile, peut-être cette molécule fut elle tout simplement celle qui était le plus aisément disponible. Son utilisation a ainsi été favorisée, les processus moléculaires l’utilisant possédant une plus grande probabilité de réalisation que les autres.
Des molécules de synthèse peuvent aussi catalyser leur reproduction, évoluer et se disputer les ressources de leur milieu. C'est le cas de l'ARNI (adénine ribose naphtalène imide) qui peut se répliquer ou s'associer avec elle-même, ou de la diaminotriazine xanthène thymine (DIXT). Ces molécules comprenant des acides nucléiques peuvent d'ailleurs se lier et engendrer par recombinaison d'autres molécules douées d'autoreplication ou non. (7).
Pour qu'une molécule soit capable de s'autorépliquer, sa forme est primordiale ainsi que la répartition des forces exercées par les différents groupements moléculaires qui la compose. Ces forces peuvent orienter et attirer les molécules de base, et la forme de la molécule permettre le rapprochement des diverses molécules afin de faciliter leur réaction: c'est le mode de fonctionnement des enzymes de nos cellules.
Une voie de synthèse possible pour l’Adénine
Nous avons donc pu former, plus ou moins facilement, le phosphate, le ribose et les bases. Il nous manque donc une dernière étape: le passage des morceaux épars à une macromolécule douée du surprenant pouvoir de réplication. Voyons comment franchir ce saut évolutif.
L’union fait la force: les riches heures des polymères
Pour enchaîner les différents monomères, il faut réaliser des réactions de polymérisation. Pour cela, il faut lier deux molécules en leur enlevant une molécule d'eau alors que dans un milieu aqueux, c'est la dépolymérisation (hydrolyse) qui est favorisée (empêchant l'allongement des polymères protéiques ou nucléiques).
Il a donc fallu que le milieu favorise la sélection des réactions de polymérisation. Pour cela, il était nécessaire de concentrer les réactifs (ou d'enlever l'eau), et de coupler la réaction à une autre qui fournissait de l'énergie (ou se déroulait dans un milieu où l’énergie nécessaire était disponible). En effet, l'allongement d'un polymère nécessite de l'énergie, qui doit être fournie par couplage avec d'autres réactions chimiques, par exemple, alors que l'hydrolyse libère de l'énergie, ce qui lui permet de se produire spontanément. Il a donc fallu que la polymérisation soit couplée à une source énergétique (8, 9).
Couplage énergétique
Certains composés comme le carbodi-imide (-N=C=N-) fournissent assez d'énergie pour une polymérisation. Ces composés se forment très facilement, et le type de liaison qui les caractérise est fréquent.
D'autres agents de couplage peuvent être le cyanogène, le cyanamide, les cyanoacétylène (tous présents dans le milieu interstellaire, donc a fortiori dans l’atmosphère primitive de la Terre) ou le diaminomaléodinitrile (revoilà notre intermédiaire de l’Adénine! L’énergie y est stockée dans une triple liaison, mettant en jeu 6 électrons, CC ou CN). Pourquoi les agents de couplage ne réagissaient-ils pas plutôt avec l'eau qu'avec les monomères présents? La liaison entre les monomères et des ions phosphates ont pu favoriser ce couplage au détriment de l'eau. Par cette voie, on a obtenu des synthèses de polyphosphates. Ces molécules sont utilisées encore de nos jours par certaines bactéries qui stockent leur énergie dans des corpuscules à polyphosphates, dans leur cytoplasme.
La réplication, un fatum moléculaire
Un organisme vivant ne peut, du fait des lois de la physique, prétendre à l’immortalité totale. Les unicellulaires ont trouvé un moyen très simple de perdurer: un individu recopie son génome, puis se divise pour en donner 2 (ou une copie de lui-même, c’est selon le point de vue adopté!). Au plan moléculaire, cela implique une transmission d’une information génétique par réplication. Une molécule est capable de transmettre une information, en fait, si elle est capable de reproduire sa forme. Sur le support de cette information génétique primitive, le débat, mine de rien, reste ouvert:
• On peut émettre l’hypothèse (qui a été la nôtre tout le long de cet article) que, comme de nos jours, ce sont les acides nucléiques qui ont toujours servi de base à l’information génétique. Longtemps, les chercheurs se sont demandé qui des enzymes ou des acides nucléiques étaient apparus en premier: nous avons vu que ces deux familles de molécules semblent indispensables l'une à l'autre. Ce petit jeu de la poule et de l’oeuf dura jusqu’en 1986 où le biochimiste T. Cech observa chez un protozoaire que l'ARN peut être son propre enzyme, catalysant lui même son découpage. Dès lors, l'ARN passa pour la première macromolécule biologique apparue sur Terre.
Il présente plusieurs intérêts: cette molécule possède de par sa structure une activité sur les protéines qui s'exerce actuellement dans des assemblages complexes, les ribosomes, dans lesquels l'ARN catalyse la formation de liaisons peptidiques entre acides aminés. D'autres ARN peuvent découper des protéines (10). De plus, ces molécules possèdent une certaine capacité d'évolution en réponse à leur environnement: l'ARN peut ainsi devenir résistant à la ribonucléase qui, normalement, le clive. Mieux encore, alors que les molécules d’ARN isolées sont reconnues comme étant extrêmement fragiles, celles qui composent le matériel génétique des viroïdes nous montrent que par une séquence permettant un repliement et l’obtention d’une forme adéquate l’ARN peut parfaitement résister aux conditions qui prévalent dans le milieu extracellulaire.
Bien que l’usage des polymères d’acides nucléiques soit aujourd’hui généralisé chez les êtres vivants, rien n’assure qu’il en a toujours été ainsi. Il est en effet difficile d’obtenir un ARN en milieu prébiotique, le seul acide nucléique facilement synthétisable étant l’adénine. De surcroît, la réplication de l’ARN nécessite des intermédiaires liés à des phosphates, ce qui est difficilement reproductible sans enzymes... Un autre problème est posé par la faible probabilité de la réplication moléculaire en milieu liquide, les nucléotides ne demandant qu’à se disperser au lieu de se disposer bien sagement sur les brins modèles de la molécule. Il semble bien que l’ARN soit encore une molécule trop évoluée, et qu’il a dû dériver d’un ancêtre plus simple. Malgré cela, cet acide nucléique doit avoir été impliqué assez rapidement dans les processus vitaux, ce qui explique notre intérêt a son égard.
Tri sélectif
Une dernière question, d’allure métaphysique, peut se poser: les molécules s’assemblent simplement à partir de leurs éléments constitutifs qui se rencontrent dans différents milieux, mais pourquoi les molécules douées du pouvoir de se répliquer ont-elles perduré? Il faut y voir le résultat d’un procédé de sélection naturelle s’appliquant au niveau moléculaire, d’un tri sélectif ne laissant que les molécules les plus performantes se complexifier encore.
En effet, les monomères nécessaires aux synthèses représentent, toute proportion gardée, les nutriments des êtres vivants: ils ne sont disponibles qu’en quantité limitée. Si la population des polymères croit trop, les monomères qui ne sont plus disponibles limitent cette croissance. Les rares molécules disponibles seront alors en priorité utilisées par les molécules qui présenteront deux caractéristiques:
• une stabilité leur permettant de ne pas se faire découper par d’autres molécules ou sous l’influence de facteurs physico-chimiques: cette sélection conduit tout naturellement à des acides nucléiques susceptibles de se replier sur eux même pour stabiliser leur forme, c'est-à-dire à une structure à double brin comparable à celle de notre ADN.
• une capacité de découpage des autres molécules, celle-ci permettant de récupérer des monomères utilisés lors de la réplication. Les molécules douées de cette capacité, même faiblement développée, vont profiter d’un avantage sélectif considérable et au bout de nombreux cycles de réplication constitueront l’essentiel de la population moléculaire. Ajoutons que cette capacité de “découpage” est toujours présente sur les ARN des cellules eucaryotes, qui “s’autodécoupent” pour former de nouveaux ARN (phénomène d’épissage).
Il n’est d’ailleurs pas exclu que les lieux favorables à la duplication des premiers acides nucléiques aient été à l’origine des cellules: la réplication était favorisée dans un espace (délimité par des cavités minérales, des feuillets argileux, des membranes lipidiques, protéiques....) dans lequel la concentration en monomères était relativement importante (11).
Une véritable pression de sélection a donc été exercée par le milieu sur les molécules elles-mêmes, et ce, depuis leur formation dans le milieu interstellaire: la sélection a commencé avant même que notre planète se forme, et ne s’est pas interrompue ensuite, ses modalités variant simplement avec les conditions physiques des milieux où elle s’est effectuée.
Une expérience (12) permet de vérifier le bien fondé de cette analyse: on utilise une enzyme d'origine virale, la Q réplicase, pour reproduire une séquence S d'ARN. Le tube de départ S0 contient S, des nucléotides triphosphatés servant de "briques de construction" et l'enzyme. Toutes les 30 mn, on prélève une fraction du mélange réactionnel et on l'incorpore dans un tube contenant de l'enzyme et des nucléotides triphosphatés. On obtient S1, S2, S3... On continue ainsi jusqu'à S100.
Comme l'enzyme produit des erreurs de réplication (1/10000), on s'attend à aboutir à une population polymorphe d'ARN, avec une sélection aboutissant à la prédominance de séquences courtes, rapidement répliquées, et de séquences de forte affinité pour l'enzyme. En somme, comme le dirait un chercheur du collège de France persuadé d’être l’alpha et l’oméga de l’univers, les erreurs se produisant au hasard lors de la copie, on doit retrouver un ensemble de séquence obtenues au hasard, sans déterminisme. Manque de chance pour ces tenants de la solitude cosmique, on obtient au contraire une population très homogène de séquences Sh différentes de S... De plus, on obtient Sh quel que soit S, pour peu que les conditions de départ soit identiques... Autrement dit, il y a eu de façon quasi déterministe sélection d'une forme particulière d'ARN parmi les 10120 possibles... Inutile donc d'essayer toutes les possibilités (on avait au maximum 1016 molécules d'ARN/tube, soit 1018 essais tout au plus...) pour arriver à un résultat a fortiori hautement improbable... La sélection naturelle s'appliquant aux molécules elles-mêmes aboutit donc à un ensemble de processus quasi déterministes (13).
Nous avons parcouru un milliard d’années, à l’aube de la vie comme disent les évolutionnistes, mais quelle aube? La nôtre seulement. Aurions-nous la triste prétention de croire que cette aurore prébiotique ne s’est levée que sur un unique océan dans le vaste univers? Une étude récente (14) montre que 25% des systèmes planétaires connus pourraient contenir une planète semblable à la Terre... Ainsi, complétant Monod (15) qui terminait son ouvrage en disant que l’homme était seul dans l’immensité de l’univers d’où il avait émergé par hasard, nous dirons que si l’être humain est une singularité probablement unique dans l’univers, de par les contingences de son histoire évolutive, la vie et l’intelligence, elles sont des nécessités à l’échelle cosmique. L’évolution moléculaire nous enseigne que nous ne sommes pas les seuls à nous interroger sous les voûtes étoilées.
“Et ils regardaient monter, en un ciel ignoré
Du fond de l’horizon des étoiles nouvelles.” V. Hugo
R.Raynal
Dr
de l’université de Toulouse
Références bibliographiques
1 - Paley W.
Natural theology or evidences of the existence and
attributes of the
deity, collected from the appearance of nature.
Faulder ed., Londres, 1802
2 - http://map.gsfc.nasa.gov/m_mm/mr_content.html
3 -
Hetch
E.
Physique.
ed. De Boeck université, 1999
4 - Blitz in L.
Complexes géants de nuages moléculaires dans la
galaxie.
vie et mort des
étoiles, ed Belin 1984
5 - Allamandola LJ, Sandford SA, Wopenka B
- Interstellar polycyclic aromatic hydrocarbons
and carbon in interplanetary dust articles and
meteorites.
Science, juillet 1987
6
-
Odom,
D. G., Rao, M., Lawless, J. G., Oro, J.
Association of nucleotides with homoionic
clays.
Journal of Molecular Evolution, v. 12, p. 365-367. 1979
7 -
Rebek
J.
Qu'est ce que la vie ?
Pour la science 203, 09/1994
8 - Poole A.M., Jeffares DC, Jefferes P.D.
The path from the RNA world.
J.Mol.Evol. 46, 1998,
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9 - Eschenmoser A.
Chemical etiology of nucleic acid
structure.
Science 284, 25/06/1999
10 - Darnell J.
L'ARN.
Pour la science 98, 12/1985, 41-52
11 -
Hazen
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Les minéraux et la naissance de la vie.
Pour La Science 284, Juin 2001
12 - Kondepudi D.
Entropy, information and evolution: new perspectives on
physical
and biological evolution.
MIT press, 1988
13 - Williams R., Fraústo da Silva JJR.
Chemistry guides evolution, claims
theory.
Related in
New Scientist, 20/01/2003
14- Tabachnik S, Menou K.
Habitable planets may be common.
Related in New Scientist
03/01/2003
15 - Monod J.
Le hasard et la nécessité. Essai sur la philosophie
naturelle de la
biologie moderne.
Seuil, 1970
16 - Ponty J.M.-
Le spectacle cosmique et ses secrets
- Larousse 1988
Remarque
Le
principe anthropique, un fumeux discours
Cogito, ergo mundus talis ect. C’est ainsi que le
philosophe J Merleau Ponty (un des rares à posséder une
vraie culture scientifique) présente le principe
anthropique (16),
c'est-à-dire une tentative de rechercher le pourquoi des
lois de la physique... Ce que nous, pouvons observer se
limite, en effet, aux conditions qui permettent notre
existence en tant qu'observateurs. Autrement dit, il aurait
suffit de quelques légères variations des constantes
physiques pour que jamais loa vie ne puise apparaître dans
l’univers... Et revoici les thuriféraires de la volonté
divine obnubilés par cette (nouvelle) lune, cherchant une
divine volonté dans les équations de la mécanique
quantique...
Halte au bluff! On veut nous faire passer pour un
raisonnement profond ce qui n’est qu’une tautologie: point
n’est besoin de s’appeler Sartre pour conclure à
l’indéfectible existence de notre propre individualité. Et
alors? Cela n’implique rien d’autre qu’un constat à priori,
dont la portée est bien inférieure à ce que l’on en dit .
Notre univers est régi par un ensemble de lois qui
permettent la vie, qu’en déduire? Comme le disait Voltaire,
si cet univers est le meilleur des mondes possibles, que
sont donc les autres?
Des réponses nous sont fournies par la cosmologie, qui en
vient à considérer notre univers comme un univers parmi une
multiplicité confinant à l’infinité, un ensemble
protéomorphe se créant à chaque seconde dans une réalité
qui ne nous est accessible que par le biais des
mathématiques. C’est ainsi qu’Andrei Linde, un des plus
profonds esprits de la physique, a présenté son modèle
d’univers autoreproducteur, qui fait de notre continuum
espace-temps un cas particulier parmi une incommensurable
variété d’univers. Certes, nous sommes. Mais la seule chose
que nous pouvons en déduire, c’est que, justement, il nous
faut continuer d’être... contre le néant!